Lancé en grande pompe le 28 août 2024, le projet de construction d’une centrale solaire de 35 MW à Karifamoriah (sous-préfecture de Kankan) semble aujourd’hui à l’arrêt complet, suscitant colère et déception dans les communautés locales.

Porté par le ministère guinéen de l’Énergie en partenariat avec l’entreprise portugaise ENERSADO, ce chantier devait initialement fournir de l’électricité à des milliers de foyers en Haute-Guinée — notamment à Kankan, Kouroussa et Siguiri — dans un délai de 12 mois. Mais près d’un an après la pose de la première pierre, les travaux n’ont jamais réellement démarré.

Djeneba Mady Kaba, planteur à Karifamoriah, exprime son amertume :
« Ils ont abattu nos arbres sans concertation, sans explication. On nous avait promis des indemnisations, mais rien n’est venu. Ma plantation existe depuis 1975. Aujourd’hui, je perds tout. »

Comme lui, d’autres habitants dénoncent la destruction de leurs champs, sources d’eau et lieux de travail sans compensation, ni relogement, ni accompagnement. Certains affirment que les inondations ont empiré depuis les travaux de terrassement, faute d’études d’impact et de mesures d’atténuation.

Le chef de quartier de Karifamoriah 1, Daouba Kaba, confirme que plusieurs citoyens ont cédé leurs terres de manière volontaire, mais attendent encore les compensations promises.

De son côté, Bintou Madi Kaba, cheffe de Karifamoriah 5, appelle au respect des engagements :
« Toute la population avait accueilli ce projet avec espoir. Aujourd’hui, cet espoir s’est mué en frustration. »
Face à la grogne montante, une mission de la Banque d’Investissement et de Développement de la CEDEAO, co-financeur du projet, s’est rendue sur place pour évaluer l’impact social de la centrale. Son représentant a promis que la voix des populations serait prise en compte pour garantir une mise en œuvre plus juste et transparente.

Lounceiny Dioubaté, impliqué dans les négociations, assure que les discussions contractuelles sont en voie de finalisation et qu’une reprise est imminente. Le PDG d’ENERSADO, tout en appelant à la patience, promet une accélération des travaux une fois les conditions réunies.
Mais dans les villages concernés, le doute l’emporte souvent sur l’espoir. Sanassy Kaba résume le sentiment général :
« On en parle depuis un an, mais rien n’avance. Nous ne sommes pas contre le projet, nous voulons juste que justice soit faite. Trop de temps a été perdu. »

Symbole d’un développement tant attendu pour la région, le projet de la centrale solaire de Karifamoriah risque de sombrer dans le discrédit si les préoccupations des communautés ne sont pas traitées avec sérieux.
Transparence, indemnisation équitable, relance effective des travaux : autant de conditions à remplir pour que l’énergie solaire éclaire enfin les foyers de Haute-Guinée.
Souleymane Tata Bangoura & Banana Chérif – www.gbaikandjamana.org
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