Autrefois perçue comme un art noble et respecté, la sculpture semble aujourd’hui reléguée au second plan face à la modernisation.

À Kankan, rares sont désormais ceux qui ornent leurs maisons ou lieux de travail d’œuvres artisanales, préférant des objets modernes et industriels.

Pourtant, derrière chaque pièce sculptée se cache un savoir-faire ancestral et une identité culturelle forte, aujourd’hui menacés.
Pour comprendre cette réalité, nos reporters sont allés à la rencontre d’Elhadj Lanciné Koulibaly, sculpteur installé dans la ville hospitalière.

Dans son atelier, ciseaux à la main, il partage son parcours et son amour pour ce métier transmis de père en fils :« Je suis né dans ce métier. Mon père l’était aussi, et il a servi dans plusieurs pays. Je marche sur ses traces. Grâce à Dieu, ce travail me permet de nourrir ma famille et de les prendre en charge. C’est un métier qui rapporte beaucoup, pas seulement de l’argent mais aussi des relations et des connaissances. Je ne me vois pas faire autre chose. Pour moi, la sculpture, c’est comme un diamant : ces œuvres n’ont pas de prix fixe, on peut faire une très bonne affaire à tout moment », confie-t-il avec fierté.

Mais derrière cet enthousiasme se cachent aussi des difficultés : la rareté des acheteurs, en particulier des touristes et collectionneurs étrangers, met en péril son activité. « Ici à Kankan, les touristes se font de plus en plus rares. Pourtant ce sont eux, avec les collectionneurs des musées occidentaux, qui achètent la majorité de nos œuvres. Leur absence complique vraiment notre travail, alors que nos sculptures n’ont rien à envier à celles d’autres pays », déplore-t-il.

Elhadj Lanciné Koulibaly appelle les autorités à soutenir les artisans de l’intérieur du pays, souvent laissés pour compte. « Je demande aux autorités de ne pas concentrer toutes les activités culturelles à Conakry. La Guinée reçoit des invitations à des foires internationales, mais cela reste limité à la capitale. Nous, ici, nous ne voyons rien. Il faut nous accorder un minimum d’attention, car nous essayons de mettre en valeur notre beau pays », plaide-t-il.

La sculpture, bien plus qu’un métier, est un patrimoine à préserver. Pour éviter qu’elle ne disparaisse dans les oubliettes de la modernisation, il est temps que le ministère de la Culture et de l’Artisanat tourne un regard bienveillant vers ces gardiens de la tradition.

Car oublier la sculpture, c’est risquer d’effacer un pan entier de l’identité guinéenne.
Lamarana Barry & Alhassane Tenin Traoré pour www.gbaikandjamana.org
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