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67e anniversaire de l’indépendance de LA guinée « S’inspirer du passé pour construire l’avenir »
Le 2 octobre 2025 marque le 67e anniversaire de l’accession de la Guinée à l’indépendance. Un moment fort de notre histoire nationale, symbole de courage, de souveraineté, et de rupture historique avec le système colonial français.
Ce jalon fondateur mérite d’être célébré non seulement avec fierté, mais aussi avec lucidité. À l’heure où la nation cherche à se reconstruire sur des bases solides et réconciliées, il est urgent d’engager une réflexion sérieuse sur notre mémoire collective : comment regardons-nous notre passé ? Avons-nous les outils intellectuels et politiques pour le juger avec justice ? Ou continuons-nous à confondre, volontairement ou non, la « raison d’État » avec les crimes impunis ?
UNE CRITIQUE BINAIRE ET CONTRE-PRODUCTIVE DU PREMIER RÉGIME.
Depuis plusieurs décennies et notamment avec plus d’acuité et de libertinage dès le 3 Avril 1984, un discours haineux, subjectif et dominant s’était contextuellement imposé tendant à diaboliser systématiquement le premier régime guinéen dirigé par le Président Ahmed Sékou Touré, en l’assimilant uniquement à une période de terreur et de répression. Bien que des violences aient été commises et celle-ci doivent être diagnostiquées et pourquoi pas reconnues mais, dans la lucidité et l’objectivité.
Certains intellectuels guinéens mues par des raisons personnelles et subjectives doivent désormais savoir que cette lecture unilatérale qu’ils imposent au peuple nie le contexte historique exceptionnel dans lequel ce régime est né et a évolué. Pire encore et par des discours totalement contre-productifs pour construire la Nation , ces soi-disant » intellectuels » empêchent les Guinéens de s’approprier leur histoire dans toute sa complexité.
Que cela plaise ou non, l’indépendance de la Guinée fut un acte de guerre froide, un geste de rupture radicale dans un monde structuré par les blocs impérialistes. Le refus du « oui » au référendum de 1958 ne fut pas simplement un choix politique, mais un acte de défi à l’ordre colonial établi. Dès lors, le jeune État guinéen s’est retrouvé dans une situation de siège permanent : sabotage économique, campagnes de déstabilisation, tentatives de coups d’État, infiltrations d’agents étrangers, propagande occidentale avec la complicité de milliers de guinéens traîtres recrutés et rémunérés par l’Etat français d’alors.
Il est donc aujourd’hui admis y compris dans les cercles d’intelligence occidentaux notamment dans le livre » LA PISCINE » écrit par les services secrets français que la France a orchestré, avec la complicité de traîtres guinéens, plus d’une centaine de tentatives de déstabilisation du pays. Faut-il rappeler que l’Etat français détient toutes les preuves sur ces milliers de guinéens traîtres dans les archives secrètes et s’abstient comme toujours à mettre toutes ces informations à la disposition de la Guinée pour définitivement trancher entre ceux qui continuent à se victimiser alors qu’ils avaient absolument trahis la Guinée et recevaient effectivement le salaire de la forfaiture et de la trahison de l’Etat français ?
Face à cette réalité, comment ne pas comprendre que certaines mesures prises par le régime de Sékou Touré aient relevé de la « raison d’État » ? Ces décisions, souvent dures et controversées, visaient d’abord à défendre la souveraineté nationale et à préserver l’unité d’un État naissant, en guerre larvée contre une puissance néocoloniale bien décidée à faire payer l’acte d’indépendance.
ENTRE DÉNI, OUBLI ET INSTRUMENTALISATION :
Le rôle problématique des intellectuels.Une grande partie de la responsabilité dans la confusion actuelle incombe à certains intellectuels guinéens. Plutôt que de contribuer à une lecture rigoureuse, documentée et nuancée de notre histoire, ils ont parfois préféré attiser les douleurs, alimenter les clivages et exporter une vision manichéenne de notre passé. Des figures respectées comme Ibrahim Baba Kaké, Djibril Tamsir Niane ou aujourd’hui Thierno Monenembo ont, chacun à leur manière, participé à cette dynamique de diabolisation.
Le problème n’est pas la critique car, toute démocratie a besoin de voix critiques. Le problème, c’est aussi et surtout la critique sélective, émotionnelle, et souvent alignée sur des narratifs étrangers ou idéologiquement biaisés. Ainsi, en refusant de considérer les actes de violence sous l’angle du contexte historique, ces intellectuels ont, sans le vouloir, renforcé l’amnésie sélective et contribué à un effritement du sentiment national.
Ironiquement, la France, souvent érigée en modèle, a elle-même justifier des exécutions sommaires au nom de la « raison d’État » après sa libération du joueur colonial allemand vers les années. Post 2e guerre mondiale : collaborateurs, prostituées, simples citoyens soupçonnés d’avoir fraternisé avec l’ennemi allemand ont été fusillés sans procès, et ces actes sont aujourd’hui considérés comme des mesures exceptionnelles de défense nationale. Pourquoi ce qui est justifiable ailleurs serait-il inacceptable ici ?
SORTIR DE LA CONFUSION :
Une nécessité pour l’avenirIl ne s’agit pas ici de nier les exactions commises par les régimes passés. Il ne s’agit pas non plus de blanchir les bourreaux ni de transformer les victimes en oubliés de l’histoire. Il s’agit de faire le tri entre ce qui relève de la violence illégitime, le crime d’État, et ce qui, dans le contexte d’un État souverain attaqué, peut être qualifié de mesure exceptionnelle dictée par la raison d’État.
Cette distinction, absente des débats actuels, est pourtant essentielle si nous voulons bâtir une mémoire nationale cohérente et juste. Une mémoire qui reconnaît les fautes, mais ne se vautre pas dans l’auto-flagellation ou la haine de soi. Une mémoire qui regarde l’histoire avec les outils de la complexité, et non avec les lunettes déformantes de l’idéologie ou de l’émotion.
POUR UNE RÉGULATION DES MÉMOIRES :
Vers une politique nationale de la mémoire.Il est temps de réglementer le débat mémoriel en Guinée. Il ne peut plus être laissé aux seuls activistes, journalistes ou auteurs partisans. Le rôle de l’État est aussi de garantir une lecture équilibrée de son histoire : En investissant dans des centres d’archives, des musées, des commissions scientifiques pluralistes ; en réformant l’enseignement de l’histoire ; et surtout, en protégeant la mémoire des grands combats patriotiques sans céder à la tentation de la réécriture idéologique.
À l’occasion de ce 67e anniversaire de l’indépendance, le slogan « S’INSPIRER DU PASSÉ POUR CONSTRUIRE l’AVENIR » doit trouver tout son sens. ▪
Cela ne veut pas dire s’accrocher au passé, mais en faire une force de projection. ︎Cela ne veut pas dire nier les fautes, mais les comprendre dans leur contexte. Cela ne veut pas dire éviter la justice, mais éviter l’injustice mémorielle. Car une nation qui ne sait pas faire la paix avec son passé ne fera jamais la paix avec son avenir.Vive la Guinée, dans sa vérité, sa dignité et sa souveraineté retrouvée.
Vive l’indépendance ! Vive la mémoire juste !

AIMÉ STÉPHANE MANSARÉ SOCIOLOGUE EXPERT-CONSULTANT EN SCIENCES SOCIALES DU DÉVELOPPEMENT DG CERFOP PCA IPCJGUINEE GUINEECOACHING